Anorexie mentale : Entourage et parentalité
Dans le précédent article, nous avons parcouru les grandes lignes théoriques de l’anorexie mentale et les concepts qui s’y rattachent. Ici, nous allons à partir du récit d’une maman dont la fille souffre d’anorexie mentale, tenter de comprendre et de mettre en lumière les difficultés que l’entourage rencontrent face à la maladie. Anorexie mentale : entourage et parentalité.
La parentalité et l’entourage sont mis à mal face à l’anorexie mentale. Il est dans la majorité des cas, indispensable de faire appel à des professionnels de santé, afin d’ouvrir le sujet et de déléguer le soin à l’extérieur du cadre familial. Cela permet aussi à l’entourage de garder une place de proches (parents, famille, amis …) !
Cet article a pour principale vocation de créer un regard pluriel, d’apporter des éléments objectifs et conceptuels sur le symptôme de l’anorexie mentale. Le vécu de la personne qui en souffre, celui de l’entourage direct qui est confronté à une grande violence face à un symptôme qui terrifie. Une dynamique s’active autour d’un trouble difficilement perceptible et compréhensible. il s’agit d’une recherche de vie par la confrontation à une image de la mort : autant de questions, incompréhensions, inquiétudes et faits qui rassemblent tout un système sur un sujet unique, mais avec une vision très différente, parfois opposée.
Cas clinique - Récit de vie d'une maman
« Quand ma fille a énoncé sont désir de perdre du poids, j’ai été très surprise car elle était déjà mince et son régime était très strict. Nous avons échangé autour de sa décision et elle a dit à son père qu’elle contrôlait, ce qui nous a interpellé. Nous avons rapidement pris rendez vous avec son médecin traitant qui a diagnostiqué une anorexie mentale. Cette annonce a été difficile, j’ai ressenti à ce moment là l’effet d’un tsunami.
Sa prise en charge a débuté avec l’hôpital de jour, je sais que ça va être long et difficile. C’est très dur de la voir perdre du poids chaque jour. Le dialogue est maintenu, elle n’est pas opposée à la prise en charge. J’essaye d’être rassurante, on évoque la maladie. Sa souffrance est visible, elle en parle un peu, je la réconforte mais au fond je suis démunie.
Évidemment je me suis posée et me pose encore mille questions : avons-nous fait ou pas fait quelque chose ? Sommes nous passés à côté de signaux en amont ? Nous essayons de nous soutenir mutuellement, de maintenir une vie familiale et professionnelle. Mais je me sens fébrile. Cette maladie prend une place importante dans notre quotidien.
" Les émotions déferlent et me submergent parfois. Je souhaite trouver la force d’affronter au mieux ce qui m'attend, d’être en capacité d’aider ma fille. "
Je ressens une grande fatigue et pas mal d’angoisses. Les premiers temps, j’avais une boule au ventre quand je rentrais la maison… Je crois que j’en ai honte. Je m’endors en pensant à ce que ma fille traverse et quand je me réveille la nuit c’est la première chose qui arrive à mon esprit. Même au travail j’ai du mal à me concentrer. Je crains aussi d’être moins performante, bien que je sais que c’est secondaire.
Les repas sont un moments difficiles. L’aider ou ne pas l’aider à composer ses assiette, l’encourager à manger ou laisser faire … Que faire face à ses refus ? Quand la restriction est forte, les réveils sont souvent accompagnés d’hypoglycémie et de nausées. C’est compliqué mais j’ai envie d’y arriver, que nous jours soient plus sereins et qu’elle se sente bien.
"Parfois j'ai envie de lâcher prise. Je sens la colère monter, puis le désarroi, et l'intense inquiétude face à cette ombre qui prend une place de plus en plus grande"
J’ai peur pour ma fille : peur que la situation s’aggrave, qu’elle en garde des séquelles, qu’une anorexie chronique s’installe ou pire, peur qu’elle meurt. Je vois qu’elle est mal, prise par quelque chose qui semble la dépasser. Je me dis qu’elle a plein de qualités, de ressources, tant de belles choses à vivre. Elle se projette dans l’avenir, à court et moyen terme, alors j’espère qu’elle trouvera la voie de la guérison.
Je me sens aussi démunie dans les réponses à apporter : est ce que je fais bien ou pas ? Comment se comporter face à elle ? Parfois en tant que parent on se dit après coup qu’on aurait dû agir autrement, mais là je me demande en amont comment agir, et l’angoisse me paralyse. On essaye de maintenir ce qui fait notre quotidien. Mais sa souffrance est parfois très présente, partout, et je me sens en hypervigilance permanente.
Je suis fatiguée ; en m’allongeant sur le canapé j’avais la sensation que mes forces me quittaient, j’étais comme vide. J’ai mille et une chose à faire mais aucune envie. Même pour les choses simples il faut que je me fasse violence. Je n’ aime pas cet état.
Je sais que ce n’est pas à moi ou à nous de trouver l’origine du mal de ma fille, c’est son chemin à elle. Je me sens impuissante. Chaque événement vécu est reçu différemment, tout dépend de l’être que nous sommes.
" Dans ces maladies le regard est tourné vers la mère, ce qu’elle a fait ou pas. On parle de mère trop absente ou trop présente. Et si j'étais les 2 mais pas comme elle aurait eu besoin ? "
J’essaye d’accepter la situation, même si je trouve ça révoltant. On est partagé entre un sentiment d’injustice et une forte culpabilité.
Face à une maladie physiologique, l’ennemi est clairement identifié et extérieur. Dans le cadre de l’anorexie, c’est plus complexe. Il me semble que les dernières recherches tendent à démontrer que cette maladie est pluri-factorielles. Mais c’est bien l’environnement qui la déclenche ?
Il faut que je me change les idées, que j arrive à penser à autre chose, mais c’est viscéral. J’ai du mal à comprendre mon état : j’ai le sentiment d’une force qui s’installe petit à petit mais elle me paraît comme factice. Les tensions commencent à s’installer dans le corps.
J’en veux à cette maladie, je la vois comme une ombre maléfique qui est entrée dans notre maison et qui prend tout, mais qui s’en prend à ma fille surtout. En ce moment je ne sais plus si chaque jour qui passe est un pas de plus vers la descente ou si quelque chose signifie une lueur d’espoir.
Question interessante et récurrente : « Ma fille n’a pas été en cours, elle était physiquement trop mal, malgré une ré-alimentation ce matin. A midi elle a mangé un peu . J’imagine que c’est dur et coûteux pour elle. Devons nous ignorer ou lui dire succinctement qu’elle a réussi quelque chose?
Anorexie mentale : entourage et parentalité
" C'est difficile de percevoir les impacts de cette maladie. Je m’inquiète pour elle maintenant et pour plus tard, que cela soit la réponse face aux difficultés qui se présenteront dans sa vie."
Est ce que le fait d’être passée à côté me fait douter de moi, de mes propres capacités ? Est ce que je me sens illégitime avec une impression d’avoir échoué dans mon rôle de maman ?
Oui j’ai ressenti une forme d’injustice. Mais injuste par rapport à quoi ? Parce que je rencontre des parents avec de fortes carences et où l’enfant ne développe pas de troubles aussi violents? Peut-être.
J’ai peur aussi d’avoir une vigilance importante dans l’avenir face à la réapparition du trouble et que cette maladie entache notre relation. Je n’ ai pas envie d’être celle qui stresse quand elle ne voudra pas de dessert ou lorsqu’à un repas l’appétit ne sera pas présent. C’est ainsi que je perçois pour le moment les « séquelles » de la maladie sur moi. Et c’est étrange de parler de cette maladie au futur.
Après quelques mois de prise en charge thérapeutique ...
Les choses avancent, doucement. L’alimentation de ma fille connaît des hauts et des bas, avec, d’un point de vue extérieur, « aucune logique ». Certains aliments sont mangés (quelques chocolats, une lichette de beurre sur une tartine, etc) et en même temps elle semble essayer par moment de réduire les quantités. Et puis par moment (quasi tous les jours), elle prend un bol de lait avec des céréales, pour atténuer sa sensation de faim. Elle a même évoqué que c’était des « aliments réconfortant » .
A ce jour, je me sens plus apaisée, plus sereine et je parviens à profiter de bons moments. Parfois des peurs intenses reviennent avec l’ombre de l’anorexie qui rôde. Mais je m’apaise et me concentre sur le jour présent sans projeter d’angoisses trop lointaines.
La « vague » est passée, laissant son écume se dissoudre.
Anorexie mentale et environnement
Anorexie mentale : entourage et parentalité
Les troubles alimentaires peuvent se développer dans divers contextes : à l’adolescence, suite à une expérience traumatique, après un décès, etc. Avec une exacerbation des ressentis et un besoin parfois « de se délester » de ce qui ne ne nous appartient pas (au sens propre et symbolique). L’environnement peut devenir difficile à appréhender, notamment à l’adolescence, période de construction et transition avec des remaniements, perte de repère ou un mal être global.
L’anorexie mentale est une maladie pluri-factorielle. Beaucoup d’éléments entrent en compte dans le développement, l’émergence et la manifestation de ce symptôme. Il y a autant de manifestations de symptôme et de mécanismes du symptôme qu’il y a de patients qui en souffre. Le contexte, l’environnement, les expériences de vie, la sensibilité de chacun, la société, le regard de l’autre, etc : tout ceci participe à l’émergence de l’anorexie mentale.
Le symptôme anorexique bouleverse tout un équilibre familial. Ce n’est pas un long fleuve tranquille mais au contraire un « vivre ensemble » animé qui demande de l’énergie.
L’anorexie mentale s’exprime via le comportement alimentaire mais ne réside pas dans cette seule difficulté. Derrière la restriction, la privation il y a une souffrance autre qui s’exprime à travers le « manger rien ».
Anorexie mentale : entourage et parentalité
Accompagner son enfant dans ses difficultés, c’est l’accueillir dans le fait qu’il/elle mange ou qu’il/elle ne mange pas. Il est important de ne pas le/la réduire à son comportement alimentaire. Vous pouvez quand il/elle aborde le sujet, lui faire remarquer qu’il/elle est fort.e et courageux.se, que vous voyez que c’est difficile pour lui/elle mais qu’il/elle se bat contre ce qui l’envahît. L’encourager à partager le repas par sa présence, et l’accompagner au mieux. L’aider à prendre conscience de ses réussites quand il/elle aborde le fait de se sentir en échec.
Pour l’individu, il peut être difficile d’entendre qu’il est « bien » d’avoir mangé. Cela peut s’apparenter à une « perte de contrôle » et donc une faiblesse.
Paradoxe et complexité de l’anorexie mentale
Anorexie mentale : entourage et parentalité
L’anorexie mentale a cette conséquence de s’immiscer et s’imposer dans la vie des personnes qui entourent celle qui en souffre. Elle crée un fort paradoxe chez tous : la personne qui en souffre prend de moins en moins de place physiquement mais la présence de l’anorexie est de plus en plus intense dans le discours et le psychisme de tous.
La restriction est très difficile à tenir sur le long terme. Les revirements de situation avec parfois un lâcher prise au niveau du contrôle alimentaire peuvent se produire. L’accompagnement pluri-professionnel est important et quelque soit le comportement alimentaire (qu’il soit stable dans la restriction, aléatoire ou « normal ») est primordial pour comprendre ce qui a provoqué cette anorexie (qu’elle soit passagère ou plus longue), et ce qui sous-tend le mal être de l’individu.
L’anorexie mentale a le même fonctionnement qu’une addiction, ou l’objet de dépendance serait la nourriture, ou le sentiment de vide et de contrôle.
Cela engendre une forme de « toute puissance » qui est stimulante et jouissive au départ. Puis elle peut devenir oppressante et terriblement enfermante. La communication est la première clé dans cette pathologie. Accueillir votre enfant en fonction de ses émotions et difficultés, ne pas le/la « forcer » mais le/la conseiller et lui montrer qu’il/elle peut s’autoriser à faire certaines choses. Apprendre à revoir à la baisse ses exigences, être la meilleure version de soi sans passer par des extrêmes ou de la souffrance, etc. Cela prend du temps et il/elle doit faire ce chemin, vers la connaissance de lui/d’elle même.
L’anorexie est une maladie qui tiraille. Qui tiraille la personne qui en souffre mais aussi l’entourage. La nourriture est crainte tout autant qu’elle fascine. La restriction entraine un sentiment de toute puissance et de contrôle jouissif tout autant qu’elle emprisonne et fait souffrir. Fuir et ne pas se confronter à des temps de repas est un moyen de ne pas être tenté.
Anorexie mentale : entourage et parentalité
La place du symptôme est une donnée très importante dans la vie du sujet qui en souffre ainsi que dans sa prise en soins :
- Est ce un objectif de contrôle ?
- De perte de poids ?
- De rejet et dégout de la nourriture ?
- De peur de l’objet « nourriture » (avec l’idée que cela est mauvais, dangereux ou va faire du mal au corps) ?
- De retour à l’essentiel et au tangible (toucher et voir les os) ?
- Une recherche de pureté ou de « nettoyage » ?
Le symptôme peut avoir une multitude d’objectifs qui au départ sont très inconscients et peu accessibles.
Le travail thérapeutique a cette vocation de permettre à la personne de trouver son chemin et de comprendre le mécanisme sous jacent à la mise en place de la maladie.
Un élément important est la perte parfois, de la réalité et le déni de l’impact de son état dans sa vie pour l’individu. Souvent, l’entourage prend conscience avant la personne qui souffre de la maladie, des dangers, limites et restrictions qu’elle engendre. L’anorexie rend « puissant » et donc annule toutes fragilités et failles chez la personne qui la vit. La pensée que, faire du sport, être hyperactif ou continuer sa vie « normalement » est forte et annule la présence d’un potentiel problème. Ça engendre souvent une grande stupéfaction quand l’entourage et le corps médical stoppent tout et posent une limite franche pour la personne malade. Une incompréhension qui s’explique par le décalage et le faussé qui se creusent entre émotions/ressentis et état concret et réel de l’être.
Le comportement alimentaire évolue en fonction de l’emprise de la maladie (plus ou moins vite, de façon parfois complètement incompréhensible et illogique pour l’entourage, sans causes visibles, etc). La restriction est un comportement qu’il est difficile à maintenir sur le long terme. Parfois, le contrôle est massif avec un refus de toute notion de plaisir (consommer les aliments crus, avec le moins de saveur possible). Ou alors dans un contrôle des quantités et un arrangement avec la réalité qui échappe complètement à toutes règles ou toute cohérence. Les aliments « plaisirs » tels que le chocolat ou le sucré/gras, sont mangés en petites quantités au détriment d’un réel repas, afin d’axer davantage sur le plaisir que sur le fait de s’alimenter ou se nourrir (qui passe en second plan). Le comportement alimentaire est le reflet des difficultés de la personne qui en souffre et de la déviance du premier objectif de l’acte de nourrissage : il n’est plus un acte primaire et besoin vital mais une façon d’exprimer des émotions ou de garder le contrôle.
Anorexie mentale : entourage et parentalité
Parentalité et culpabilité
Il n’est absolument pas question de trouver un coupable dans le symptôme de votre enfant. En tant que parent.s, vous n’êtes pas responsable de ce qu’il se passe pour lui/elle.
Un parent n’est jamais parfait, par le simple fait qu’il est avant tout un être humain. Etre parent est le métier le plus difficile, et celui pour lequel il n’existe aucune formation. L’amour, la sécurité, l’écoute, l’éducation, un milieu protégé et suffisamment ouvert, une possibilité de grandir en fonction de sa personnalité, la prise en compte des individualités et spécificités de chaque enfant, voilà ce dont un enfant a besoin pour se construire au mieux. Evidemment, la vie n’est simple et tranquille pour personne, les déceptions ainsi que les moments difficiles font partie de toutes existences et c’est aussi comme cela que chacun se forge. Vous avez certainement offert tout cela à vos enfants.
Le sujet, au cours de sa construction et de sa vie va faire ses expériences. Vivre des événements qui sont plus ou moins évidents en fonction de sa personnalité et de ses particularités, indépendamment de son éducation.
Le plus important est d’être là où vous vous sentez dans votre place et dans votre rôle de parent.
En tant que parent, vous élevez vos enfants au plus près de vos convictions, de vos principes et valeurs. Il n’y a pas de question de « trop » ou « pas assez ». Vous avez donné à vos enfants ce que vous pensiez être le meilleur à chaque moment. Certes vous avez eu des manques, des absences, vous avez certainement déçu.e, mis.e en colère. Il/Elle a certainement déjà eu le sentiment de ne pas être compris.e, de n’être pas toujours libre de faire ce qu’il/elle souhaitait. Quel enfant n’a pas déjà ressenti tout cela envers ses parents ? Dans l’évolution d’un être humain il est primordial qu’il soit déçu, triste, en colère, frustré, énervé ou en désaccord avec ses parents.
Les liens sociaux commencent au sein du cercle familial avant de s’étendre dans d’autres groupes propres à l’individu.
Anorexie mentale : entourage et parentalité
Anorexie mentale : Entourage et parentalité dans l'accompagnement
Dans l’accompagnement de son enfant sur le chemin des TCA, les parents sont directement investis. Votre cœur de parent parle avant tout le reste. La douleur est viscérale. Vous avez la place la plus difficile dans cette situation et il est important que votre enfant rencontre des professionnels de la santé pour traiter ce qui est de l’ordre des symptômes. Votre place de parent peut alors être conserver. Vous ne pouvez pas être l’infirmière, le médecin ou la psychologue. Cette ouverture vers l’extérieur vous permet d’être à 100% présent en tant que parent auprès de votre enfant. L’impuissance ressentie face à l’impossibilité d’ôter tous les maux de votre enfant est terrible. Mais gardez toujours en tête qu’il/elle a la chance de vous avoir à ses côtés. Vous pouvez lui exprimer votre inquiétude. Tout en lui disant aussi que vous êtes là, que vous serez à ses côtés pour avancer et affronter les étapes les unes après les autres, et que vous avez confiance en lui/elle.
" Vos émotions et votre amour sont les premiers obstacles à une objectivité envers votre enfant. Et c’est normal et légitime. "
Au début du symptôme et pendant une durée plus ou moins longue, le symptôme a un impact fort sur l’ensemble de la famille. Il est souvent difficile d’accepter, que ce symptôme « fige » la vie familiale et oblige à vivre au jour le jour, à son rythme. Il est malgré tout important de garder en tête la possibilité de vous octroyer des temps pour vous, de diverses façons (soirées et moments en dehors de la maison, activités sportives, etc…).
Emotions et légitimité
Les troubles du comportement alimentaire peuvent provoquer diverses émotions dans l’entourage. Cette pathologie n’impacte pas seulement l’individu malade, mais bien tout son environnement.
Vous avez le droit certains jours, de ne pas vouloir rentrer à la maison et de ne pas vouloir retrouver les difficultés et le combat. De parler d’injustice et d’exprimer votre inquiétude. Tout ceci est légitime. Les troubles du comportement alimentaire épuisent. Ils épuisent la personne qui les vit, mais souvent avant cela, ils épuisent l’environnement proche et inquiètent. Sentez vous légitime dans tout ce que vous ressentez (fatigue, angoisses, peur). Car toutes ces manifestations émotionnelles ne sont pas à l’égard de votre enfant directement, mais de la situation. L’amour pour votre enfant reste inchangé, il n’est pas affecté. Mettre des mots sur tout cela, c’est éviter les quiproquos et débordements.
" La colère ressentie contre votre enfant, contre ce symptôme, contre cette incompréhension et ce mal être qu’il/elle exprime, est légitime. "
Il est primordial, que vous gardiez des activités personnelles dans votre emploi du temps. Des temps qui vous permettent de déconnecter de votre quotidien. Ça ne sera pas du « temps en moins » pour votre enfant, au contraire, cela vous donnera plus de disponibilité psychique et physique dans les moments auprès d’elle/de lui. Et votre enfant a besoin d’être certain.e aussi, que vous gardez votre propre vie. Que toute votre vie ne tourne pas autour d’elle/de lui. Cela peut créer de la culpabilité de part et d’autre, et générer des tensions au sein de la relation.
Mais alors ... Que faire ?
L’anorexie mentale peut être pour la personne qui en souffre, notamment à l’adolescence, un moyen de ne pas mourir psychiquement. De ne pas renoncer à son propre « moi ». De ne pas être ce que les autres voudraient les faire être.
C’est une maladie très complexe parce qu’elle est à la fois liée au corps physique, au corps psychologique et neuronal. La cause est multifactorielle et varie selon les individus. La guérison est un processus plus ou moins long. Alors que les symptômes physiques sont trop visibles pour être niés, identifier un dysfonctionnement psychologique est loin d’être évident pour le sujet et l’entourage. « Forcer à manger » ne sera pas la « bonne » façon d’agir, car cela aura davantage pour conséquences de renforcer la restriction. En tous cas si cela vient de ses proches.
" Demander de l'aide extérieure n'est pas synonyme d'abandon, cela est nécessaire et primordial pour des conditions idéales de prise en charge. Cela offre aussi un soutien utile et libérateur à toute la famille "
Il est important de ne pas se projeter trop loin dans le temps. Cette maladie nécessite une vigilance au jour le jour. Certaines personnes s’en sortent sans séquelles, sans rechutes, et ne gardent pas de comportements en lien avec le symptôme. Plus les symptômes sont perçus tôt, plus la prise en soins est précoce, plus les chances d’amélioration et de « guérison » sont importantes.
Ce symptôme outrepasse toutes les capacités d’une famille. Elle génère une telle inquiétude, que cela sidère et empêche de voir clair en l’avenir. Il n’est pas question d’échec ou de mauvais comportements. En tant que parents, vous avez fait ce que vous pensiez être bon pour votre enfant, vous avez été au plus près de ses besoins. Mais à présent, il/elle est un être humain à part entière avec des éléments sur lesquels vous n’avez pas le contrôle.